Interview Louise Wessbecher
- Fanny Rosselin

- 11 juin 2023
- 7 min de lecture
Louise Wessbecher est actuellement Cheffe du service Culture & Divertissement mais aussi rédactrice en chef. Pour cet interview, elle nous raconte son (double) rôle ainsi que son parcours pour en arriver jusqu'ici.
1. Quelle est votre fonction au sein de la rédaction ?
Cheffe de pôle culture et divertissement : Jusqu’à la semaine dernière, j’étais cheffe du service culture du HuffPost depuis 4 ans et demi. Depuis le 1er juin, je suis rédactrice en chef du site.
2. En quoi cela consiste réellement ?
Être cheffe de service, c’est animé une équipe de journalistes qui traitent l’actualité de la culture, des médias et du divertissement. Il y a plein d’autres thématiques dedans, le cinéma, les séries, le people… Mon travail, c'est de faire en sorte de définir ce qu'on couvre sur ces actus-là et de quoi on a envie de parler et de quoi on a envie de relayer sur le HuffPost.
C’est ce qu’on appelle l’animation éditoriale. C’est valider les sujets que proposent les journalistes du service, impulser des idées de rebond sur des moments d’actu ou des angles. Mais c’est aussi organiser la partie agenda sur la culture, donc c’est préparer les sorties qu’on a envie de couvrir et de recommander à nos lecteurs (cinéma, série, musique, livres,...). Ce côté animation éditoriale, c’est vraiment le travail principal du chef de service. Il y a une toute partie d’écriture aussi. Au HuffPost, les chefs de service continuent à écrire quelques articles et de faire des interviews.
Il y a aussi une partie management. C’est-à-dire faire des points avec les gens du service, les accompagner, les faire progresser notamment avec des formations sur certains points, gérer les plannings et les vacances. Et aussi la partie management, c’est le recrutement et la partie formation des stagiaires et des alternants.
Et rédactrice en chef, c’est la même chose mais à une échelle plus grande. La partie animation éditoriale, au lieu de s’appliquer à un service, elle s’applique à tous les services de la rédaction. Il y a plus de questions sur les objectifs du site, la ligne éditoriale du site. S’ajoute plus une partie de réflexion sur le long terme contrairement au poste de chef de service.
3. Comment choisir un sujet ? Comment prioriser un sujet en fonction de la ligne édito du HuffPost ?
La ligne éditoriale est définie par la rédaction en cheffe et par la direction. Il y a une espèce de canva qui est posé. Certaines choses sont là depuis que le HuffPost existe, depuis 10 ans, ça fait partie de l’identité du site. Le HuffPost, c'est un site de “hardnews” donc c’est le news, le chaud avant tout. Mais dedans, on y rajoute du rebond d’actu, des sujets un peu plus long. Jamais moi, je ne pourrais décider, dans mon service culture, de faire uniquement de l’interview ou du magazine très long. Là, il y aura un problème. Donc au poste de chef de service, tu ne peux pas décider de changer complètement le fond de la ligne. Par contre, chaque chef de service à une marge de manœuvre que quel type de culture on a envie de raconter, à qui on a envie de s’adresser. Moi, j’ai toujours voulu de la culture populaire, accessible à tout le monde. C’est pour ça qu’on veille sur la TV, ce sont les derniers programmes gratuits. C’est là où il y a potentiellement 4 millions de personnes qui regardent ces programmes chaque soir de façon gratuite sur TF1 ou M6. Et surtout que l’on puisse parler des très grosses sorties, comédies.
On s’était posé la question sur le dernier film Obélix. Tout le monde disait que c’était nul. Certains médias, dans ce cas-là, ont fait le choix de ne pas en parler du tout parce qu’ils estiment que c’est nul et donc qu’il ne faut pas en parler. Moi, ça me paraît impossible de me dire un truc comme ça. En fait, c’est un énorme film avec un casting et un réalisateur dont on parle très régulièrement sur le site donc évidemment qu’on va parler de ce film. Après, il faut voir sous quelle forme et avec quel angle.
Moi, j’ai en tête les grandes lignes de ce que je veux qu’on raconte au quotidien. Mais on en discute aussi dans le service. Il y a des idées qui viennent dans les conférences de rédaction et de service auxquelles je n’avais pas forcément pensé / repérer et en entendant l’idée, je me dis : "oui, c'est un sujet". Ce n’est jamais un truc tout seul sinon ça ne marche pas. Il faut se servir des forces de l’équipe et des domaines de spécialités de chacun parce qu’on couvre des thématiques extra large.
Nous on a ce prisme d’actu qui prend le dessus. Donc le côté breaking news / chaud est en priorité. (exemple : Gérard Depardieu qui meurt) Quand je définis les priorités, il y a aussi (au fur et à mesure des années) une grille avec des sujets, des personnalités, des thématiques où je sais que ça intéresse les gens, peu importe ce qu’ils font. Il y a une grille “intérêt des lecteurs” en fonction des clics. Dans les priorités, il y a aussi le fait qu’on couvre toutes les thématiques. J’essaye de faire attention aux sujets validés, qu’il n’y est pas que du cinéma mais de la musique, du cinéma, des livres, des expos…
4. Est-ce qu'il y a une perspective d'évolution dans les choix éditoriaux du HuffPost ?
Oui, je pense qu’il faut se renouveler tout le temps. Comme on est sur le web, il y a plein de façon de consommer l’info donc notre but, c'est de continuer d’être lu et d’être présent sur les plateformes et dans des formats qui intéressent les gens. Il faut qu’on se colle aux habitudes de consommation de l’info des gens. Il faut qu’on arrive à suivre ce qu’il se passe. Il y a toujours l’envie de se renouveler et regarder ce que font les autres médias. C’est un monde très concurrentiel. Qu’est-ce que nous on peut apporter de plus ? C’est quoi notre particularité ? Il faut se démarquer avec une série ou un dossier par exemple.
Moi, personnellement, j’ai besoin d’avoir des nouveaux challenges et des nouveaux objectifs. Je ne pourrai pas commencer une année en me disant “bon, on fait la même chose que l’année dernière.
5. Quelles sont les qualités pour être journaliste au HuffPost ?
Il faut être informé et vraiment être à fond. Il faut réellement aimer ça. L’actu ça peut être un rouleau compresseur pour certain. Il faut aimer le rush et aimer travailler dans la rapidité à un certain moment. Il faut être agile et assez souple. Des fois, il se passe un truc qui fait que tout ton programme de la journée, tu ne pourras pas le suivre ou avancer sur ton sujet parce qu’il y a une autre actu qui prend le dessus. Il faut être souple dans le caractère mais aussi dans la façon de travailler. Il faut aussi du ton pour chercher des bons sujets et ne pas hésiter à s’amuser dans la titraille et les angles. Apporter un peu de fraîcheur parce que ça fait partie de la ligne du Huff.
6. Quel est votre parcours professionnel ?
J’ai fait l’IJBA, l’école de journalisme de Bordeaux. J’ai été diplômée en 2012. Quand je suis sortie de l’école, j'ai d’abord eu un contrat d’été chez "Culture box". Avant que ça soit une chaîne de télé. Avant, c'était le site internet culture de France Télé. C’était quelque chose d’actu avec des petits reportages. J’ai pigé un peu pour "Melty". Avant, c'était vraiment moderne d’avoir un site comme ça avec du SEO et des audiences. C’était en pige, ça a duré deux mois. Ensuite, j’ai été recrutée par Webedia pour le lancement du site "Purebreak", qui est le site ado de Webedia. Avec des thématiques TV et people. Moi j’étais plus sur la musique. J’y suis restée trois ans. Je suis partie de "Purebreak" pour un autre lancement de site, celui de "Mashable", un média américain qui avait des éditions dans plusieurs pays. Ça existe toujours aux US mais ça a fermé en France. C’était très tech et culture / divertissement. Dans chaque pays, le média était en partenariat avec un média national. Et en France, c'était avec France 24, en 2016. J’étais en charge du service culture, mais j’étais toute seule… J’ai bien aimé toutes ces expériences de lancement de site. Tu participes à des choses auxquelles tu ne participerais pas si tu arrivais dans des grosses rédactions. "Mashable" a été racheté par un très gros groupe américain et ils ont décidé de fermer toutes les éditions. Au moment où on était en train de terminer nos négociations de départ, on m’a contacté pour le poste de chef de service pour le HuffPost en 2019.
7. Vous avez toujours eu envie de faire de la culture ? Sur le web ?
La culture toujours. C’est ce pourquoi je voulais faire du journalisme. J’ai toujours eu envie de couvrir ces thématiques-là. Dès que je suis sortie de l’école, j'ai directement bossé sur ça. Sur le web, quand j’étais à l’école de journalisme, je n’avais pas vraiment en tête de vouloir faire du web, mais plus du magazine. Pour être tout à fait honnête, mais c’est aussi le cas de plein de gens de ma génération, en fait, c'était sur le web qu’il y avait du travail. 2012, c’était un peu le moment où toutes les rédactions agrandissaient / lançaient leur édition web. Donc c’est là où il y avait du travail quand je suis sortie de l’école, donc je suis allée là où il y avait du travail. Et je n’ai pas eu envie d’en repartir parce que ça me plait bien. J’ai l’impression d’être une vielle personne mais à l’école de journalisme les seuls cours qu’on avait pour le web, c'était comment s’inscrire sur Twitter. Ça n’existait pas. Ma spécialité, c'était “Presse écrite”.





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